Retour sur la loi AGEC

Jeudi 24 octobre à Annecy, SoluCir a organisé un temps d’échange en présence de Véronique Riotton, députée de la Haute-Savoie et rapporteure de la loi AGEC.

Du contexte.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, Véronique Riotton revient sur le parcours pour voter cette loi. Comment l’écrire ? Quelles trajectoires ? Quels objectifs ? Quelles marges de manœuvre ? Quel équilibre entre sollicitation et interdiction ? Quel constat partage-t-on ? Quels changement sont à produire ? Quels compromis pour que la loi puisse être votée ?

S’ajoute à ce cocktail, la méconnaissance de l’économie circulaire. La nécessité de rappeler, encore aujourd’hui, que non, l’économie circulaire n’est pas l’ESS mais un business modèle de transformation. La députée précise : « Ce n’est pas un acquis, c’est un combat. »

Prêt.e.s pour cette bataille ?

La loi AGEC, mais de quoi parle-t-on ?

Une loi ambitieuse dont l’objectif est de passer d’une économie linéaire à une économie circulaire. Il ne s’agit plus de produire, consommer et jeter, mais de limiter au maximum la production de déchets, tout en favorisant le réemploi et la réutilisation, ou le recyclage, afin de préserver les ressources naturelles et réduire l’impact environnemental de la gestion des déchets.

La loi Agec, constituée de 130 articles, propose de nombreuses mesures permettant d’engager la transition vers l’économie circulaire, réparties en cinq axes majeurs :

  • Sortir du plastique jetable
    • atteindre le zéro plastique jetable d’ici 2040
    • remplacer la vaisselle jetable des fast-food par de la vaisselle réutilisable
    • favoriser le vrac pour réduire les emballages
  • Mieux informer les consommateurs
    • rendre le tri plus efficace grâce à un logo unique, des modalités de tri et une harmonisation de la couleur des poubelles
    • mettre au point une méthodologie obligatoire pour l’affichage environnemental
  • Lutter contre le gaspillage et favoriser le réemploi
    • interdire la destruction des invendus non alimentaires
    • créer des fonds pour le réemploi dotés de plus de 50 millions d’euros chaque année
  • Agir contre l’obsolescence programmée
    • appliquer un indice de réparabilité et tendre vers un indice de durabilité
    • faciliter la réparation et favoriser l’utilisation de pièces détachées d’occasion
  • Mieux produire
    • étendre la responsabilité des industriels dans la gestion de leurs déchets en créant de nouvelles filières, notamment déchets du secteur du bâtiment
    • créer des plans quinquennaux d’écoconception
    • encourager les produits plus respectueux de l’environnement avec un système de bonus-malus

En 4 ans, quelles avancées majeures ?

Comme en témoignent les nombreuses auditions menées par les rapporteurs, cette loi est globalement saluée par les différents acteurs, qu’il s’agisse des consommateurs, des industriels ou des collectivités territoriales. Bien que complétée depuis par d’autres dispositions législatives, elle reste structurante et a permis de mettre la France sur la voie d’un changement de paradigme en faveur de l’économie circulaire. On assiste ainsi depuis 2020 aux prémices de nouveaux modes de consommation et de production durables.

Parmi les réussites, ont été mentionnées :

  • La capacité à embarquer un écosystème,
  • L’innovation générée,
  • L’économie circulaire s’est installée dans le paysage,
  • Le modèle de REP est repris au niveau européen,
  • Le modèle a développé de la coopération et de la mutualisation,
  • L’offre a évolué,
  • La partie aval a été particulièrement travaillée.

Quelles mesures non appliquées et quels freins ?

Pour autant, force est de constater que plusieurs dispositions de la loi sont peu appliquées, voire pas du tout appliquées, ne font pas l’objet de mesures de suivi ou de contrôle, ou se heurtent à divers blocages, que ce soit à l’échelle locale, nationale ou européenne. La loi Agec, souvent considérée comme « ambitieuse » et « pionnière », a créé de grandes attentes chez l’ensemble des acteurs français de l’économie circulaire. Elle doit pourtant encore faire ses preuves. Le rapport d’évaluation formule ainsi des recommandations pour rendre la loi Agec plus effective dans la transformation de notre société vers un modèle d’économie circulaire.

  • Des données encore parcellaires pour évaluer la mise en oeuvre de la loi
  • Une mise en oeuvre de la loi focalisée sur l’aval : collecte, le tri et le recyclage, au détriment d’une approche globale de l’économie circulaire et de l’amont : allongement de la durée de vie, éco-conception, …
  • Une gouvernance des filières à responsabilité élargie du producteur à repenser et des contrôles à renforcer
  • Des dispositions précurseurs que la France peine à imposer au niveau européen
  • Une formation insuffisante pour permettre la massification, notamment de la réparation

Quelles préconisations pour la suite ?

Bien que certain.e.s le réclament, pas d’AGEC 2 en vue mais un panel de préconisations avec la même volonté : préférer l’incitation mais contraindre pour accélérer :

  • Axe n° 1 : Améliorer l’information du consommateur et inciter aux achats durables en favorisant la réparation
  • Axe n° 2 : Réduire les emballages en plastique à usage unique
  • Axe n° 3 : Faire du réemploi une priorité
  • Axe n° 4 : Poursuivre la lutte contre le gaspillage
  • Axe n° 5 : Accompagner la mise en place de la filière REP bâtiment et de la filière REP des véhicules
  • Axe n° 6 : Renforcer la prévention de la production de déchets
  • Axe n° 7 : Revoir la gouvernance des filières REP
  • Axe n° 8 : Renforcer le suivi et le contrôle des filières REP
  • Axe n° 9 : Inciter davantage à l’écoconception et à l’allongement de la durée de vie des produits
  • Axe n° 10 : Mettre la commande publique au service de l’économie circulaire
  • Axe n° 11 : Améliorer le tri et la collecte des déchets
  • Axe n° 12 : Poursuivre la lutte contre les dépôts sauvages
  • Axe n° 13 : Améliorer le recyclage des plastiques
  • Axe n° 14 : Accompagner la valorisation des biodéchets

C’est quoi la suite ?

  • Mettre en œuvre la loi à travers des campagnes de communication,
  • Réallouer la Taxe Générale sur les Activités Polluantes (TGAP) à l’économie circulaire,
  • Militer auprès des nouveaux ministres concernés (industrie, économie, transition écologique, …),
  • Continuer à faire vivre le rapport et acculturer au plus hauts niveaux,
  • Poursuivre la coopération.

Alors que le budget de l’ADEME pour l’économie circulaire est en passe d’être divisé par deux, ces mots prononcés par Véronique Riotton résonnent : « Continuez, continuons collectivement pour faire ces changements, l’économie circulaire doit trouver sa place ».

Le pont est fait avec SoluCir et ses adhérent.e.s et c’est bien là que vous nous trouverez, sur le pont !