Habiter en 2050
Dans le cadre de Territoire Circulaire et Robuste en 2050, SoluCir a accueilli Cyril Dion pour une conférence exceptionnelle : « Quand la puissance des récits inspire notre territoire ». A l’issue de la conférence du militant écologiste, réalisateur, écrivain, des acteurs des deux Savoie sont venus partager leurs rêves et leurs témoignages autour des 3 thématiques principales du projet : habiter, produire, se nourrir.
Nous vous proposons ici la restitution de l’intervention de Claire Lucas, Sarah Cohen, Astrid Magnin et Damien Barru sur : habiter.
Le rêve
Par Claire Lucas,
Co-fondatrice, Au Bercail
Vision idéale et néanmoins réaliste 2050
Souvenez-vous, en 2026, on a enfin arrêté de construire sur les terres agricoles et les espaces naturels.
Cette sobriété de consommation des sols, n’a pourtant pas sonné la fin de la fête dans l’agglomération chambérienne. Mais au contraire, ça a été une belle invitation à faire mieux.
Déjà, plutôt que de systématiquement tout mettre à plat, on a tous appris (habitants, élus, architectes, urbanistes, entreprises et artisans) à faire avec le bâti déjà là.
Ah c’est sûr qu’au premier abord cela pouvait paraître moins funky que l’image d’une ville futuriste, alors que plus de 80% de notre ville de 2050 était déjà en place en 2025.
Et pourtant, à y regarder de plus près, tellement de choses ont changé :
> On a appris à collaborer pour voir, au cas par cas, ce qui devait être rénover ou renouveler.
Ça nous a rendu inventif sur les surélévations et les extensions, en donnant au passage un p’tit de coup de jeune aux constructions en place, pour améliorer le confort thermique et baisser la facture d’énergie.
Ces approches ont permis aux filières de réemploi de matériaux de se structurer, et de reconnaître pleinement les savoir-faire manuels.
Forcément cela a eu des répercussions positives sur la formation professionnelle et sur les filières de valorisation des ressources locales.
> On a aussi beaucoup appris à changer sur les usages. Dans les années 2020 déjà, les Tiers Lieux et les espaces de coworking ont commencé à donner le ton. On a mixé et intensifié les usages au sein d’un même lieu.
L’habitat n’est pas resté en reste de cette dynamique. Nous avons ainsi appris à mutualiser les espaces intérieurs comme extérieurs. Est-ce que vous connaissez un seul habitat collectif auj. qui n’a pas une chambre d’amis indépendante, sa buanderie ou son potager partagés ?
Le plus flagrant est peut-être celui de la mutualisation des voitures. Comment on a pu se laisser baratiner à avoir tant de voitures particulières, qui restaient stationnées en moyenne 23 h/jr…Heureusement que des précurseurs de l’autopartage nous ont aidé à nous réveiller sur ce sujet pour faire en sorte que la ville ne soit plus un parking géant.
D‘autant qu’avec l’espace retrouvé, un nouvel horizon nous est apparu. C’est celui des sols. Cette ressource totalement invisibilisée que nous avions sous les pieds.
On a enlevé des m² et des m² de goudron. Ça a permis à l’eau de pluie de s’infiltrer à nouveau et de redonner vie à la terre. De très nombreux arbres et arbustes ont ainsi pu être plantés pour rendre la ville plus verte et ombragée.
> Et peut être plus encore que l’amélioration de notre cadre de vie, ce sont les liens qui nous lient qui se sont le plus transformés, et le concept de voisinage a repris tout son sens à l’échelle de l’immeuble, de la rue et même du quartier
Les expériences
Par Sarah Cohen,
Co-fondatrice, Au Bercail
Il a donc fallu à un moment essayer de faire autrement.
Urbanistes, nous avons d’abord conseillé les élus pour continuer de faire des projets sans consommer de terre agricole.
Avant de changer de casquettes, pour ne plus dire ce qu’il faut faire mais concevoir de petites opérations d’habitat. D’urbanistes nous voilà devenues avec AU BERCAIL, des pico-promoteuses immobilières. C’est-à-dire qu’on construit des logements pour les vendre, mais à notre sauce.
Ce qui nous motive c’est de partir d’un lieu déjà bâti, pavillon des années 60 ou friches urbaines, pour le faire évoluer en un nouveau lieu de vie,
- en trouvant le juste équilibre entre densité et jardin,
- en travaillant à l’intégration architecturale et paysagère du projet, par la prise en compte des arbres, de certaines traces historiques comme de vieux murs en pierre, par la rencontre des voisins et la considération de leurs points de vue,
- de concevoir avec des architectes des constructions performantes qui mettent en œuvre des ENR, avec des logements traversants, des matériaux bio-sourcés et de plus en plus le réemploi de matériaux de construction,
- de proposer la mise en commun du jardin, d’une chambre d’amis, d’une buanderie, etc
En somme en pico-promotion, on est comme des promoteurs avec l’envie de bien faire (…et peut-être moins de faire un max de cash). Ca permet à des personnes d’acquérir, y compris en Bail Réel Solidaire, ou de louer, un logement de qualité dans une petite copropriété conviviale, entre voisins sympas.
On soutient aussi d’autres approches « alternatives » mais qui offrent comme intérêt supplémentaire de sortir l’habitat du champ spéculatif.
C’est le cas :
- d’une partie des projets d’Habitat participatif accompagné localement par Unitoit
- de la création récente d’une Foncière Alpine FISSA, pour porter localement des projets d’immobilier solidaire
- et de l’implication active d’AU BERCAIL au sein de la société coopérative SILVAÉ, qui propose un modèle d’économie circulaire très abouti pour valoriser des ressources locales (le bois) et construire des logements où la propriété est remplacée par un droit d’usage pour des habitants associés.
En soutenant ces initiatives, on peut faire en sorte que ces réalisations « à la marge » infusent le reste du système.
Par Astrid Magnin,
Coordinatrice de la matériauthèque ENFIN!Réemploi
Le collectif La MADRée a signé la scénographie de cet événement. Nous vous invitons à découvrir leur note d’intention ici !
Par Damien Barru,
Architecte, Collectif La MADRée
